FRANÇOIS VINCENT TOUSSAINT
AN UNPUBLISHED LETTER FROM 1751


Paris ce 16 Juin 1751.

Monsieur




L’Etude du vrai & de la pratique du bien sont les deux carrieres qui
conviennent le plus essentiellement à l’honnête homme, & celles où il lui
importe davantage d’atteindre au but. Je m’applique à fournir l’une &
l’autre. Dieu seul jugera lors de ma dissolution, si j’ai rempli la seconde,
si j’ai pratiqué le bien. Nul ne sait ici-bas s’il est digne d’amour ou de
haine, mais pour l’étude du vrai, j’oserois presque me flatter de n’y avoir
par marché tout-à-fait à tâtons depuis que l’Academie Royale a daigné
m’adopter dans son sein. Voudroit-elle aggréger un aveugle a des Lynx ?
Ne croyez pas cependant, Monsieur, que sous prétexte de defendre
l’adoption de l’Academie, je m’enorgueillisse au point de me supposer l’égal
des illustres associés à qui elle m’aggrege. Si quelquefois j’ai l’œil juste,
je n’ai pas le regard assûré de l’aigle ; & ma vûe ne tiendroit pas longtems
fixée, sans s’ébloüir, sur ces sciences abstraites & effrayantes pour l’esprit
humain que les membres de votre docte Academie approfondissent tous
des télescopes : ils atteignent aux objets les plus éloignés de la portée
les jours avec un succès si brillant. Leurs yeux sont par eux-mêmes
humaine. Moi, si j’apperçois quelques verités, ce ne sont que celles que tous les
hommes ont sous la main, & que tous appercevroient s’ils vouloient s’y
rendre attentifs.

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